Fukushima, 2014 – 2034

À 14h46, le 11 mars 2014, des milliers de ballons, symbolisant des colombes, ont pris leur envol dans le ciel du Japon. Pour commémorer, 3 ans après, jour pour jour, la tragédie de Fukushima.

Sous l’effet cumulé d’un séisme, ajouté d’un tsunami et d’un accident nucléaire, la catastrophe a fait quelques 20 000 morts et laissé, dans une région exsangue, des stigmates pour des décennies à venir.

Les enfants en premier ligne

Selon un bilan très succinct d’Europe Écologie les Verts, les premiers cas de cancer sont apparus sur les enfants, également 1600 décès prématurés, liés au stress de l’évacuation.

Quant au nombre de réfugiés, il approche, sans que l’on sache exactement, les 200 000 personnes.

Information muselée

De plus, le lobby nucléaire nippon fait tout pour contenir ces informations en favorisant un protocole entre l’Agence  de l’énergie atomique (AIEA) et l’Université de Fukushima), garantissant dorénavant leur confidentialité.

Sur le plan économique, le coût est exorbitant, déjà chiffré par TEPCO, l’opérateur, à 35 milliards d’€, à raison de 715 € par mois alloués à toutes personnes ayant subi le stress de l’évacuation.

Fermer le robinet

Il envisage de clore ce chapitre en février 2015, alors que la situation des réfugiés, demeurée très précaire, est loin d’être réglée.

Les travaux de décontamination se monteront probablement à 100 milliards d’€, et cela dans un des pays déjà les plus endettés du monde (225% du PIB). Bonjour la balance commerciale nippone (On se souvient qu’on avait évalué le coût d’un accident nucléaire grave en France à 400 milliards d’€).

Un tiers des travaux

Comme « lecrapaud » l’a signalé à plusieurs reprises, cette décontamination est loin d’être sous contrôle. L’eau polluée continue à s’écouler dans la mer, même si l’on parvient parfois à stopper les écoulements avant qu’ils atteignent le rivage.

L’entreprise admet que ses interventions ne couvrent pas plus du tiers des besoins nécessaires et  subit les critiques, accusée sous-estimer en permanence les efforts à faire.

TEPCO triche

Comme elle le fait avec les degrés de contamination, notamment quand ils dépassent les 2000 becquerels et saturent les instruments de mesure.

Échaudés, de nombreux habitants s’appliquent à mesurer eux-mêmes cette radioactivité et sont en première ligne pour constater les « arrangements »s de TEPCO, semble-t-il de concert avec les autorités japonaises.

Cauchemar  quotidien

La date anniversaire de Fukushima ? Pas de crainte, on en causera encore pendant 20 à 30 ans, le temps qu’il faudra pour décontaminer et démanteler toutes les installations, avec la dispersion continue d’une radioactivité invisible.

20 à 30 ans aussi pour une litanie de cancers, malformations, fausses couches, au sein de populations chamboulées, sur 2, voire 3 générations, par le traumatisme provoqué par la catastrophe et les conséquences sur leur vie.

Les effets des ruptures avec sa maison, son travail, ses repères sont dévastateurs. Au point que beaucoup ont perdu la parole, murés dans une atroce solitude. Disparus des radars-medias.

Et de nouveaux accidents d’ouvriers sur le site même, dont un mortel, on sait que les travaux y sont très rudes.

Relance ?

Les dizaines de milliers de personnes réunies à Tokyo, ce 11 mars, souhaitaient, au delà de la commémoration, également marquer leur hostilité à la décision probable du gouvernement de relancer l’activité nucléaire dans le pays (toutes les centrales sont à l’arrêt).

Tout aussi motivés, les antinucléaires qui, saisissant l’occasion de la date anniversaire, se sont réunis place de la Bastille à Paris en hommage aux victimes.

Fessenheim dure

Ou ceux défilant joyeusement sur le pont de Kehl, sur le Rhin, formant une longue chaîne humaine, comme celle de Valence en 2012 réunissant alors 60 000 personnes et réclamant la fermeture de la centrale de Fessenheim.

« Edf pense que ses centrales bénéficient d’une technique de meilleure qualité. TEPCO, c’était pareil », entendait-on dans les rangs.

Nucléaire hors d’âge

Le sort de Fessenheim n’est pas seul en cause. 80 % du parc nucléaire français est en limite d’âge, bon pour la casse, après 40 ans d’activité. Edf, on le sait, souhaite prolonger son extension jusqu’à 50, 60 ans.

Opération dite de « grand carénage », chiffrée à quelques 55 milliards par l’opérateur (400 millions en 2008, mais il y a eu Fukushima entre temps).

On saura en 2018

Selon le cabinet Wise-Paris, pour Greenpeace, on peut se demander si les coûts annoncés autorisent la prolongation dans des conditions de sureté proches des EPR, comme le veut la doctrine française.

Une commission d’enquête  de l’Assemblée apportera en juin ses propres réflexions sur le problème, suivie par d’autres organes. Avis définitif en 2018.

Sortir du nucléaire, tel est le vrai et seul débat pour les écologistes, en réduisant notre consommation d’électricité ( le Japon y est bien parvenu après la catastrophe) et en donnant toutes leurs chances, enfin, aux énergies renouvelables.

Course au gaz liquide

Privé de l’atome, qui assurait 30% de sa production, le Japon siphonne aujourd’hui toutes les quantités de gaz liquide disponibles sur le marché international.

Au point, selon GDF Suez, que l’Europe, la France en particulier, ne sont plus desservis correctement, avec d’éventuelles incidences sur une hausse des prix domestiques. Une fois encore, l’effet papillon.