Vers l’abeille hygiénique

Constats alarmants. Les abeilles continuent à vivre l’extinction rapide de leurs populations. Le Président Obama s’en est inquiété récemment.

Mais les Etats-Unis ne s’annoncent pas seuls sur le front du combat planétaire pour sauver la gent mellifère.

Le défi est de taille, qui voit se multiplier les recherches, parfois psychédéliques, sur l’abeille du futur, résistante aux agressions les plus diverses.

Cité par la Maison blanche, les apiculteurs américains déplorent la perte de 42% de leurs colonies dans les 12 derniers mois, la deuxième plus forte mortalité dans les annales.

La litanie des malheurs est connue: mites parasites tels que le redouté Varroa destructor, nombreux virus, défauts d’éléments nutritifs, pesticides.

Une loque

Les abeilles d’Afrique du sud pour leur part souffrent d’un germe, la loque américaine, qui n’a d’américain que par la nationalité de son découvreur, un certain White en 1920. C’est un bacille qui s’incruste dans le couvain, la crèche des larves.

Une fois dans leur tube digestif, la bactérie peut se démultiplier dans leur corps, de plusieurs milliards de bâtonnets en quelque heures, si bien qu’elle en modifie le métabolisme.

Diversité

La reproduction des ouvrières s’en trouve compromise, la ruche est morte. D’autres abeilles s’y précipitent et signent à leur tour leur disparition (pour résumer).

Cette loque ne sévit pas seulement en Afrique (également en Amérique du nord et en Europe) depuis des siècles. Les abeilles sud-africaines y avaient résisté jusqu’à présent, grâce à la diversité des espèces (on le sait, c’est quand il n’y a plus diversité, donc biodiversité, que les dangers s’accumulent).

Propagation

Mais, ces derniers mois, la loque s’est répandue massivement, elle a gagné dans l’ouest un territoire de 500 sur 400 km2, tous les ruchers quasiment sont infectés. La propagation frappe les esprits.

« Je ne vois pas ce qui pourrait l’arrêter, la production de miel n’est pas seule en cause, mais également tout notre secteur agricole estimé à 1, 5 milliard d’€ », déclare un agronome du Cap.

Branle-bas

Un programme d’action est en cours. Large information sur la maladie, règles plus strictes de gestion des ruchers, analyse régulière des larves. Suffira-t-il ?

À Washington, le président Obama appelle, lui, à un vrai branle-bas de combat, sollicitant toutes les ressources de la recherche scientifique d’une part.

Monoculture

Les nombreuses agences fédérales se voient donner pour objectif, quant à elles, d’accroitre l’étendue et le qualité de l’habitat des méllifères (et autres pollinisateurs, papillons monarques entre autres), en diversifiant les plantes sur les terres fédérales pour répondre au mieux à leurs besoins nutritifs.

Il s’agit notamment de restaurer dans ce sens des millions d’hectares de terres domaniales et privées. De trop vastes régions du pays,  dédiées à la monoculture du maïs ou du soja, les privent de leurs garde-manger habituel.

Habitat

On ne s’étonnera pas que la Maison blanche se soit exprimée de façon très mesurée par ailleurs sur les dégâts des pesticides, Monsanto et les grands céréaliers sans doute veillent au grain.

Le « territoire », c’est bien là l’une des clés du problème.

En France, dans les Deux-Sèvres (Poitou-Charente), des chercheurs de l‘Inra disposent depuis 7 ans de 45 000 hectares, sur lesquels ils ont dispersé 150 colonies.

Richesse

Un observatoire naturel baptisé Ecobee pour parvenir à cerner l’écologie de l’abeille et les facteurs d’effondrement des populations.

Les ouvrières à la recherche du pollen y disposent de 13 000 parcelles agricoles, dont la richesse florale est parfaitement identifiée.

Il y a 3 ans, les études ont notamment mis en évidence les effets nocifs du Cruiser, entre temps interdit en France.

Ressources

Mais l’effort actuel porte principalement, selon le  National Geographic dans son numéro de juin, sur les ressources alimentaires. Surabondance à la floraison du colza et du tournesol, en avril et juillet.

Dans les mois « creux » demeurent les fleurs des arbres et la flore sauvage, avec une préférence pour les adventices ou mauvaises herbes, genre coquelicot, le mal-aimé des agriculteurs.

Complexité

Évidemment, quand le pollen fait défaut, le couvain souffre et, en cascade, s’éteignent les bataillons de butineuses et leur production de miel, nourriture de l’hiver.

Aujourd’hui encore, les apiculteurs, voire les chercheurs s’étonnent devant ces créatures complexes, dans leurs communautés très organisées. Et peinent à trouver des réponses au massacre qu’elles vivent actuellement.

Hygiénisme

On tourne beaucoup dans les labos américains autour d’une abeille hygiénique, susceptible lors de sa toilette journalière de se débarrasser des acariens, avant que ceux-ci se fixent sur elles.

Ou creuse aussi du côté de la biologie moléculaire, un consortium d’une centaine de chercheurs est parvenu à décoder le génome de l’abeille mellifère.

Super-bee

Ces travaux pourraient donner naissance à des individus génétiquement modifiés, la iron-bee, l’exemplaire super armé, super performant. Et par défaut, on pourrait recourir à des mini-drones pollinisateurs (Université de Harvard).

Son ennemi numéro un, affirment certains, c’est l’agriculture industrielle. Oublions chimie et manipulation, que l’abeille cherche elle –même par évolution successive la solution à ses problèmes.