Énergie, quel charivari !

Le débat sur la transition écologique, en cours, ne fascine pas les foules, sorti du problème posé par la fiscalité du diesel. Mais la question de savoir de quelle énergie vivra la France demain donne lieu actuellement à un tel charivari, que le bon peuple risque de s’y perdre.

Prenons Fessenheim. On fermera l’usine alsacienne, doyenne des centrales françaises, d’ici à 2016. Affirmation encore récente du Président de la République.

Philippe Martin, Ministre de l’écologie, assoit le propos : Les engagements pris durant la campagne électorale seront tenus.

En ligne de mire, ramener la part du nucléaire dans la production électrique française de 75 à 50% d’ici à 2025.

Qui mène le bal ?

Mais la fronde gronde. En septembre 2012, les salariés se rebiffent. Épaulé par l’organisation patronale Medef, le patron d’Edf, Henri Proglio, homme de réseaux s’il en fût, mène le bal.

La compagnie nationale engagerait 70 millions d’€ pour réaliser des travaux sur les 2 réacteurs alsaciens, afin de prolonger leur durée de vie d’une dizaine d’années !

Philippe Martin tacle Henri Proglio : Edf doit nous aider à réaliser nos décisions et non à s’en affranchir.

Un curseur intouchable

Penons le gaz de schiste. Un lourd boulet que le gouvernement risque de traîner longtemps, même si chef de l’état et premier ministre, cadrés par les écologistes au gouvernement comme par les militants ( pour ces derniers un « curseur inoxydable »), réaffirment à l’envie qu’il est hors de question d’exploiter cette éventuelle richesse sur le sol national.

Arnaud Montebourg met les pied dans le plat. Affirmant, cette fois au nom du « bon sens »,  qu’il ne faudrait pas fermer la porte à son exploitation. Et cela en audition à l’Assemblée nationale.

Améliorer la technologie

Ajoutant qu’on arrivera bien, dans très peu de temps, à améliorer la technologie de la fracturation hydraulique pour la rendre moins « polluante »

Bien que connu par sa liberté de parole – et parfois d’action, le Ministre du Redressement productif se fait tacler à son tour par Jean-Marc Ayrault. « Dans ce dossier, il n’y a qu’une politique au gouvernement ».

Ces permis dans les Cévennes

Mais la messe n’est pas dite, semble-t-il. Au gouvernement de François Fillon, Jean-Louis Borloo, alors Ministre de l’écologie, accorde des permis miniers dans le sud de la France, notamment, par un choix malencontreux, au beau milieu du parc des Cévennes.

Lui se voit aussitôt taclé par José Bové , organisant la fronde, comme il sait le faire, qui monte jusqu’en Île de France, où d’autres permis ont été accordés.

Une loi bâclée

L’interdiction de la fracturation sur le sol national fait l’objet d’une loi, celle du 13 juillet 2011, jugée insuffisante par les socialistes dans l’opposition, avec un Arnaud Montebourg, alors détracteur farouche de la fracturation,  jugeant qu’il s’agissait d’une « fausse bonne idée ».

Précipitation sans doute du gouvernement Fillon. Car le Conseil constitutionnel, saisi par le Conseil d‘État, pourrait la censurer dès l’automne prochain.

Les Américains attaquent

C’est une compagnie pétrolière américaine, Schuepbach, qui monte au front, considérant que l’annulation de ses permis, suite à la loi, portait atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution.

Une censure remettrait en question l’annulation des permis et le rejet de certaines demandes. Car l’extraordinaire boom du gaz de schiste continue à hanter le rêve des industriels (Grande-Bretagne et Allemagne ont décidé d’explorer).

Une mission ambiguë

L’on s’étonnera plus alors qu’une commission ( Affaires économiques) décide de lancer  une mission d’information sur l’impact de l’essor de cette exploitation outre-Atlantique. Afin de s’intéresser au stockage, au marché boursier spot, aux contrats à long terme, etc.

Le communiqué est plutôt ambigu. Il ne s’agit pas de « rouvrir le débat mais d’établir un  diagnostic ». Pour ébranler les positions gouvernementales ?

Chère, chère l’économie verte

Enfin le dossier des énergies renouvelables. Voici le pavé dans la mare lancé par la Cour des comptes, qui les accumule ces derniers temps. « Oui aux énergies vertes, mais elles risquent de plomber l’économie française ».

La part des ENR est passée de 10,3% à 13,1% et devrait monter à 23% en 2020.  Sortis de la poche du consommateur comme du contribuable 14,3 milliards d’€ en cumulé , soit par les aides publiques, soit par le fameux CSPE, la contribution incluse dans chacune de nos notes d’électricité.

Pas de pilotage d’ensemble

Les objectifs sont ambitieux, difficiles à atteindre. En raison de « coûts de production élevés, aidés par des systèmes de soutien complexes et d’efficacité variable, un cadre juridique instable et contesté » ( on se souvient des allers et retours dans les subventions sur le photovoltaïque).

Cette fois, c’est l’État lui-même qui se fait tacler, qui n’a pas su « adapter son organisation, ce qui nuit à la visibilité et au pilotage de l’ensemble ».

Vive le nucléaire ?

Plus difficile à digérer pour ceux qui soutiennent, à juste titre, l’essor des ENR, seule alternative pour le futur des générations et déplorent le retard pris par la France, la prise de position de la Cour sur le nucléaire.

Lequel produit, dit-elle, une électricité meilleur marché, réduit les effets de serre, la Cour soulignant, comme par hasard, le bénéfice que d’autres pays tirent des huiles et gaz de schiste.

Chaud, très chaud

S’annonçant dès à présent avec des désaccords entre les parties prenantes, le débat sur la transition énergétique doit aboutir à des conclusions en septembre. À l’image de la canicule actuelle, il sera très chaud.