Amazonie, entre espoir et désespoir

C’est un cri d’alarme. Dans la tribu des Guarani-Kaiowà, au sud du Masso Grosso (Brésil), le désespoir est tel que les suicides se multiplient, un par semaine, 56 pour l’année 2012.

Dépossédés de leur terres par les fermiers et les éleveurs,  ce groupe connu, qui compte 31 000 individus, a perdu les terres clairement délimitées, qui constituaient son territoire et vit désormais dans des camps au bord des,routes.

État de dévastation

«  Nos jeunes pensent qu’ils ne leur reste plus rien. Ils s’assoient et pensent, et se suicident », note un Guarani au représentant de Survival International.

En 2003, l’un de leurs chefs, Marcos Veron, voulant récupérer un terrain volé, avait été tué dans l’opération. Comme dans bien d’autres cas, depuis les multiples conquêtes de terres inconnues, le vol des terres plonge les peuples indigènes dans un état de dévastation, marqué notamment par l’alcoolisme.

L’engagement de Lula

Les nouvelles concernant la déforestation de l’Amazonie brésilienne n’ont pas toutes ce caractère dramatique. Extrêmement inquiétante jusqu’en 2004, elle a été divisée par 5 depuis, pour passer de 27 000 à 4 800 km2 l’an.

Les observateurs le reconnaissent, le discours au Sommet de Copenhague en 2009 du très vénéré Président Lula s’était avéré déterminant dans la lutte entreprise pour freiner les dégâts. À cette tribune, il annonçait que le Brésil s’engageait à réduire de 80 % l’abattage forestier  d’ici à 2020.

Utopie en 2009, l’objectif annoncé est déjà presque atteint aujourd’hui. Mais au-delà de l’influx politique, on notait le rôle décisif des…satellites.

Interdiction de prêts

Partant de données satellitaires, l’Institut national de recherches spatiales brésilien décidait d’établir une liste des zones critiques. Déclarées territoires protégés en quelque sorte, le gouvernement interdisait désormais aux banques d’accorder des prêts aux agriculteurs et fermiers, en passe de développer leurs activités.

À l’époque où la destruction battait son plein, un grand réseau de télévision nationale souhaitait de son côté informer son public du problème, en ouvrant un site Facebook. Ainsi, les téléspectateurs se trouvaient en mesure de visualiser ce qui passe réellement dans la forêt. Et de donner un avis.

Bovins et soja

Mais à nouveau, après quatre années de baisse consécutives, la tendance s’est inversée avec une augmentation de 28 % en 2012, dans 3 États, Roraima, Maranhao, et surtout Mato Grosso, aux mains des grands producteurs de soja et d’éleveurs de bovins.

Les écologistes dénoncent l’entrée en vigueur d’un nouveau code forestier, fortement assoupli au Parlement par les « ruralistas », porte-parole du secteur agricole. « Sur les exploitations, il y a un climat de victoire dans l’air », note un coordinateur de Greenpeace, du fait que les exploitations sont dispensées désormais entre autres de reboiser les surfaces détruites.

Gros chantiers et crime organisé

Réduction des surfaces protégées, ouverture de gros chantiers d’infrastructure entraînent un sentiment d’impunité. A quoi s’ajoute la complicité de certains responsables politiques devant une forme de crime organisé. Le gouvernement brésilien semble déterminé cependant à retrouver le seuil des 4000 km2 déforestés par an.

50 000 routes

Sera-t-il encore temps pour sauver certaines tribus, si leur sort comme celui des Guarani n’est pas déjà scellé, question posée ?

En l’espace de 3 années ( 2004 –  2007 ), on a construit 50 000 kilomètres de routes dans cette vaste région, afin d’accéder aux zones vierges convoitées. Certes si ces routes n’occupent qu’une petite surface au sol, l’impact environnemental, au-delà des conséquences humaines, est évident. Elles empêchent le déplacement des espèces, fractionne leur habitat et, parfois, provoque leur perte.

1170 parcelles

Le frein à mettre à la déforestation est d’autant plus urgent, que l’on ne cesse de redécouvrir la richesse de la forêt amazonienne. Elle compte plus de 16 000 espèces d’arbres différentes ( la Guyane française à elle seule 210 espèces, plus que toute l’Europe ).

Une équipe scientifique a voulu voir les choses de plus près en étudiant 1170 parcelles d’un hectare pour commencer l’inventaire de 11 000 espèces rares. Du fait d’une répartition très limitée, elles risquent de disparaître avant même d’avoir été étudiées.

Des espèces inconnues à foison

Au ras du sol, on a découvert dans ce réservoir de biodiversité et répertorié 441 nouvelles espèces, plantes, poissons, amphibiens, reptiles, oiseaux, mammifères ces dernières années (WWF).

Les scientifiques sont des poètes, on sait. Hormis un piranha végétarien ( cela change de ses voraces congénères, terreur des éléments liquides), ils ont baptisé un singe qui ronronne comme un chat « caqueta titi monkey » et un lézard particulièrement timide, malgré sa peu striée de flammes « gonatodes timidus ».