Ecoutez donc la biodiversité !

Au train où vont les disparitions d’espaces naturels sauvages, on sait la biodiversité fortement menacée et son étude une sorte de challenge pour les scientifiques, qui s’y intéressent. Un entomologiste du Muséum d’histoire naturelle de Paris, Jérôme Sueur, apporte une nouvelle dimension dans cette observation, à savoir par les sons. Déjà, auteur d’une remarquable étude sur les chœurs de cigale, ces chants synchronisés et alternés, émis par des milliers d’individus, souvent à la même heure et au même endroit. Il n’est que de penser à leurs bruits –la cigale stridule- ou ceux des grillons le soir venu dans le sud, enchanteurs et fatigants à la fois.

C’est ce qui a amené l’entomologiste à imaginer collecter puis identifier l’ensemble des animaux peuplant un biotope au moyen d’en enregistrement sonore, dispositif rapide, peu coûteux et sans contraintes pour eux. Chants des oiseaux, cris des mammifères, coassements des amphibiens, appels sexuels des insectes se mêlent et donnent un environnement sonore global déjà très indicatif. Plus le lieu laisse entendre des fréquences différentes, plus il s’avère riche en espèces. Certes, cela ne permet pas une idée exacte du nombre d’individus ni de chaque espèce, mais peut mettre en évidence la « qualité » du biotope observé. « Nous avons testé notre méthode dans deux forêts sèches de Tanzanie, l’une intacte, l’autre pauvre et dégradée, résultats très probants », déclare l’entomologiste au magazine National Geographic dans son numéro de mars.

La méthode ouvre évidemment de nombreux champs d’investigation, selon les heures, les saisons, à différentes hauteurs de la canopée, peut-être même en la testant dans les milieux liquides. Et qui sait, l’industrie du Cd nous offrira peut-être de grands concerts symphoniques de la biodiversité, comme il existe déjà de passionnants enregistrements de chants des baleines ou des dauphins.